La fin du contrat de bail intervient par la résiliation, qui marque l’extinction du contrat de durée sans pour autant constituer une résolution (annulation rétroactive). Ce mécanisme est essentiel dans la gestion des rapports locatifs, tant pour le bailleur que pour le locataire. Dans cet article, nous examinons les modalités de résiliation ordinaire et extraordinaire, en détaillant les règles applicables aux contrats de durée déterminée et indéterminée, ainsi que les protections offertes aux parties.
1. Résiliation Ordinaire
La résiliation ordinaire intervient à l’échéance conventionnelle ou légale du contrat et ne nécessite aucune formalité particulière autre que celles prévues par la loi.
a. Contrat de Durée Déterminée
- Fin automatique :
Pour un bail à durée déterminée, le contrat prend fin le dernier jour du délai fixé par les parties (article 266 al. 1 CO). Aucune démarche supplémentaire n’est requise. - Renouvellement :
Un bail de durée déterminée peut être reconduit de manière expresse ou tacite. En cas de reconduction tacite, le contrat devient un bail de durée indéterminée (article 266 al. 2 CO), afin de préserver le droit de résiliation ordinaire. - Modification unilatérale impossible :
Ni le bailleur ni le locataire ne peuvent modifier unilatéralement le contrat (par exemple, en demandant une augmentation ou une diminution du loyer) pendant sa durée.
b. Contrat de Durée Indéterminée
- Principe :
Tout contrat non conclu pour une durée déterminée est réputé être de durée indéterminée (article 255 al. 2 CO). La résiliation ordinaire, également appelée congé, permet à l’une ou l’autre des parties de mettre fin au contrat de manière unilatérale. - Forme et validité du congé :
Le congé doit être donné par écrit, et, pour les baux d’habitation et les locaux commerciaux, le bailleur doit utiliser la formule officielle prévue par le 9 OBLF (article 266l CO). Un congé qui ne respecte pas ces conditions est nul (article 226o CO).
Il doit clairement exprimer la volonté de mettre fin au bail à une date déterminée, sans qu’il soit nécessaire de motiver cette décision (cf. 9 al. 1 lit. c OBLF). - Termes et délais :
- Terme : Il s’agit de la première date à laquelle une partie peut valablement mettre fin au contrat. Les parties fixent généralement ce terme (souvent la fin d’un mois) ou, à défaut, c’est l’usage local qui s’applique (fin de mars, juin, septembre, décembre, etc.) ou ce qui est prévu aux articles 266c et suivants CO.
- Délai : Un délai minimal (par exemple, trois mois) doit s’écouler entre la réception de la résiliation et le terme effectif. Par convention, ce délai peut être prolongé, mais jamais raccourci.
Si une partie ne respecte pas ces termes et délais, la résiliation prendra effet lors du prochain terme pertinent (article 266a al. 2 CO).
- Protection du conjoint :
Pour les logements familiaux, le conjoint qui n’est pas partie au contrat ne peut résilier le bail sans le consentement exprès de l’autre conjoint (article 266m CO). De plus, le congé du bailleur doit être adressé à la fois au locataire et à son conjoint (article 266n CO) ; à défaut, il est nul (article 266o CO).
2. Résiliation Extraordinaire
La résiliation extraordinaire permet de mettre fin au contrat de manière anticipée, sans respecter les délais et termes légaux ou conventionnels, dès lors que certaines conditions exceptionnelles sont réunies.
a. Pour le Bailleur
Le bailleur peut exiger une résiliation extraordinaire dans les cas suivants :
- Retard dans le paiement du loyer :
Si le locataire accuse un retard, conformément à l’article 257d CO. - Violation du devoir de diligence :
En cas de manquement du locataire à ses obligations de diligence (articles 257f al. 3-4 CO). - Changement de propriétaire :
En application de l’article 262 al. 2 CO. - Pour de justes motifs :
Tel que prévu à l’article 266g al. 1 CO, lorsqu’un événement d’une gravité exceptionnelle, imprévisible et non imputable à la partie invoquant le motif, rend la poursuite du bail intolérable. Ce juste motif peut découler d’événements généraux (guerre, crise économique ou sanitaire) ou de l’état de l’immeuble. Le bailleur doit mentionner ces motifs dans la formule officielle et indemniser le locataire du préjudice résultant de cette résiliation anticipée. - Faillite du locataire :
Si le locataire fait faillite après la remise du bien, le contrat ne prend pas fin automatiquement. Le bailleur peut alors exiger des sûretés. Si le locataire n’est pas en mesure de les fournir, la résiliation extraordinaire peut intervenir. Quatre conditions sont requises :- La faillite survient après la délivrance du bien.
- Le jugement de faillite est devenu définitif.
- Le bailleur a accordé au locataire un délai raisonnable pour fournir des sûretés pour les loyers futurs.
- Ni le locataire ni l’administration de la faillite ne fournissent les sûretés demandées.
- Sursis concordataire du bailleur :
Cette hypothèse n’est pas abordée ici.
b. Pour le Locataire
Le locataire peut également exiger la résiliation extraordinaire dans les cas suivants :
- Défaut de la chose louée
- Pour de justes motifs (voir ci-dessus, article 266g CO)
- En cas de décès du locataire :
Les héritiers prennent automatiquement la place du défunt et peuvent résilier le bail en respectant le prochain terme et le délai légal (article 266i CO). - Pendant la prolongation du bail
- Sursis concordataire du locataire :
Conclusion
La fin du contrat de bail, qu’elle soit ordinaire ou extraordinaire, repose sur un ensemble précis de règles destinées à garantir un équilibre entre la liberté contractuelle et la protection des parties. La résiliation ordinaire offre une solution prévisible à l’échéance du contrat, tandis que la résiliation extraordinaire permet d’agir en cas de circonstances exceptionnelles ou de manquements graves. Cette organisation juridique vise à sécuriser la relation locative en permettant des ajustements en temps opportun, tout en préservant les droits fondamentaux du locataire et du bailleur.
Ces mécanismes invitent à une réflexion sur l’adaptation des pratiques locatives aux réalités économiques et sociales, et sur la nécessité d’un cadre juridique capable de répondre aux imprévus tout en assurant la stabilité contractuelle.