La Réquisition de Vente des biens saisis

La réquisition de vente est l’acte formel par lequel les biens saisis sont mis en vente (c’est-à-dire réalisés). Ce dispositif, prévu à l’article 116 LP, marque une étape cruciale dans la procédure d’exécution forcée puisqu’il permet de transformer les actifs saisis en liquidités pour désintéresser le ou les créanciers. Nous abordons ici successivement la notion de réquisition de vente, le profil du demandeur, ainsi que le mécanisme du sursis à la réalisation.


La Réquisition de Vente (Art. 116 LP)

La réquisition de vente est le formulaire que le créancier doit remplir afin d’initier la vente des biens saisis. Elle doit être réalisée dans le respect de délais stricts prévus par la loi :

  • Le délai d’attente :
    Ce délai, qui débute dès la saisie, interdit toute réquisition de vente pendant une période déterminée :
    • Pour les biens mobiliers : un délai d’un mois,
    • Pour les biens immobiliers : un délai de six mois.
  • Le délai de péremption :
    À l’issue du délai d’attente, le créancier dispose d’un délai maximum pour procéder à la vente :
    • Pour les biens mobiliers : la vente doit être réclamée dans l’année qui suit la saisie,
    • Pour les biens immobiliers : ce délai est de deux ans.

Si ces délais ne sont pas respectés, la poursuite se périme et la procédure devra recommencer.


Le Demandeur de la Réquisition de Vente

La demande de réquisition de vente peut être formulée par différents acteurs, selon les situations :

  • Le créancier saisissant :
    Celui qui a procédé à la saisie peut demander la vente, ce qui engage l’ensemble des créanciers de la série. Une fois que l’un d’eux sollicite la vente, cette demande s’applique à tous.
  • Le créancier ayant saisi la plus-value :
    Si aucun autre créancier ne demande la vente d’un bien (par exemple, une maison), celui qui a saisi la plus-value peut, lui-même, solliciter la vente. Cette possibilité est d’autant plus importante que certains créanciers peuvent abandonner la poursuite s’ils estiment avoir été satisfaits autrement.

Au stade de la réquisition de vente, on entre dans la phase finale de réalisation : les biens seront bientôt saisis physiquement pour être mis en vente.


Le Sursis à la Réalisation (Art. 123 LP)

Le sursis à la réalisation représente la dernière possibilité pour le débiteur d’échapper, temporairement, à la vente de ses biens. Il s’agit d’une mesure d’ordre social destinée à permettre au débiteur de payer ses dettes par échéances, sans être immédiatement privé de ses actifs.

Conditions et Modalités

Le sursis est une décision de l’office des poursuites, imposée même si le créancier n’est pas d’accord. Il est soumis à trois conditions principales :

  1. Preuve de solvabilité :
    Le débiteur doit démontrer qu’il est en mesure de payer sa dette par paiements mensuels fractionnés. Cette exigence, relative par nature, vise à éviter que le débiteur ne puisse régler la totalité de sa dette d’un seul coup.
  2. Engagement de paiement mensuel :
    Le débiteur doit s’engager à verser, chaque mois, une fraction de sa dette.
  3. Paiement immédiat d’un acompte :
    Un acompte doit être versé dès l’octroi du sursis.

Durée et Effets

  • Durée maximale du sursis :
    • Pour la majorité des cas, le sursis ne peut excéder 12 mois.
    • En cas de créancier privilégié (comme c’est le cas dans certaines procédures de faillite, art. 119 LP), le délai est limité à 6 mois.

Si le débiteur ne respecte pas ces conditions, le sursis est immédiatement caduc (selon l’art. 123 al. 5 LP), et la vente des biens peut être réalisée sans qu’il soit nécessaire de déposer une nouvelle requête.

Cas Particulier : La Saisie du Salaire

Lorsqu’il s’agit de la saisie du salaire, le débiteur ne bénéficie d’aucun sursis. En effet, l’employeur est immédiatement informé qu’il doit reverser une partie du salaire à l’office des poursuites, et aucun délai de sursis n’est accordé, même si le texte de loi pourrait laisser envisager cette possibilité.


Conclusion

La réquisition de vente est une étape déterminante dans l’exécution forcée, car elle permet de transformer les actifs saisis en liquidités afin de satisfaire les créanciers. Le respect des délais – tant le délai d’attente que le délai de péremption – est impératif pour la validité de cette démarche. Par ailleurs, la possibilité d’intervenir en tant que demandeur, qu’il s’agisse du créancier saisissant ou de celui ayant saisi la plus-value, montre la flexibilité de la procédure. Enfin, le sursis à la réalisation offre une bouée de sauvetage au débiteur, lui permettant de s’acquitter de ses dettes par paiements échelonnés, bien que cette mesure soit strictement encadrée et puisse être levée en cas de non-respect des conditions.

Ce dispositif, tout en garantissant la protection des droits du créancier, vise à concilier efficacité de l’exécution forcée et préservation des droits sociaux du débiteur, illustrant ainsi la complexité et l’équilibre du système juridique suisse en matière d’exécution.