Le contrat de bail impose au locataire un ensemble d’obligations détaillées dans les articles 257 à 257h du Code des Obligations (CO). Ces obligations concernent tant le paiement du loyer et des frais accessoires, que l’usage et l’entretien du bien, ainsi que les modalités de restitution en fin de bail. Afin d’y voir plus clair, nous regroupons ces obligations en trois catégories : les obligations pécuniaires, les obligations résultant de l’usage de la chose, et les obligations en fin de bail.
1. Vue d’ensemble
Les dispositions relatives aux obligations du locataire prévoient que celui-ci doit notamment :
- Payer le loyer et les frais accessoires (articles 257 à 257d CO)
- Verser des sûretés (article 257e CO)
- Respecter une obligation de diligence et d’égard envers les voisins (article 257f CO)
- Aviser le bailleur en cas de défaut de la chose louée (article 257g CO)
- Tolérer les réparations et les inspections de la chose (article 257h CO)
Ce dispositif est complété par l’obligation pour le locataire de remédier aux défauts qui lui sont imputables (articles 259 et 259a CO a contrario) et par l’obligation de restituer la chose à la fin du bail (article 267 CO).
2. Les Obligations Pécuniaires
a. Paiement du loyer et des frais accessoires (257 à 257d CO)
Le loyer, défini à l’article 257 CO, est la rémunération due par le locataire au bailleur pour la cession de l’usage du bien. Il constitue l’unique obligation principale du locataire, et il demeure dû même si le bien n’est pas effectivement utilisé. L’absence d’accord sur le montant du loyer empêche la formation du contrat.
Modalités de paiement
- Montant : Fixé selon la liberté contractuelle (article 19 CO) avec des limites en fonction de la nature du bien (loyers absolument libres, relativement libres ou contrôlés).
- Lieu : Le paiement s’effectue au domicile du créancier au moment du paiement (article 74 al. 2 c. 1 CO).
- Moment : Par défaut, le locataire doit payer le loyer et les frais accessoires à la fin de chaque mois (article 257c CO). Les parties peuvent toutefois convenir d’autres modalités (par exemple, un paiement à l’avance).
En cas de retard de paiement, le locataire tombe en demeure. Les termes fixés contractuellement agissent comme des termes d’exigibilité et comminatoires (article 102 al. 2 CO). Ainsi, si le locataire ne paie pas, il est en demeure dès l’expiration du délai fixé par le contrat, sans que le bailleur ait besoin de l’interpeller. Pour résilier le bail immédiatement en cas de non-paiement, les quatre conditions suivantes doivent être réunies :
- Le locataire doit être en possession du bien (le bailleur a donc déjà délivré le bien).
- Le locataire accuse un retard dans le paiement du loyer ou des frais accessoires.
- Le bailleur fixe un délai de paiement (avis comminatoire) : au moins 30 jours pour un bail d’habitation ou un local commercial, et 10 jours pour les autres baux.
- À l’expiration de ce délai, le locataire ne s’est pas acquitté intégralement de sa dette.
Dans ce cas, le locataire doit également réparer le préjudice subi par le bailleur (par exemple, en cas de difficulté à trouver un nouveau locataire).
Paiement par compensation
Le paiement du loyer par compensation est possible (article 265 CO) et permet au locataire de compenser sa dette de loyer avec une créance qu’il détient contre le bailleur. Aucun accord contraire n’est possible.
Droit de rétention du bailleur
Pour les locaux commerciaux, le bailleur peut exercer un droit de rétention sur les meubles du locataire (article 268 al. 1 CO) afin de garantir le paiement du loyer.
Frais accessoires
Les frais accessoires, définis à l’article 257a CO, correspondent aux prestations fournies par le bailleur ou un tiers en rapport avec l’usage du bien (chauffage, eau chaude, électricité, etc.) et aux contributions publiques occasionnées par cet usage (eau potable, épuration, enlèvement des ordures). Ils sont à distinguer des frais d’entretien, qui restent à la charge du bailleur, et des frais de consommation, qui résultent d’une relation directe entre le locataire et un prestataire (téléphone, wifi, etc.).
- Modalités de perception :
- Acomptes provisionnels suivis d’un décompte final, permettant soit une restitution, soit un paiement complémentaire.
- Forfaitaire selon une moyenne sur trois ans (par exemple, CHF 30 pour la conciergerie ou CHF 100 pour le chauffage).
L’article 257b CO précise que pour les habitations et locaux commerciaux, le bailleur ne peut facturer que les dépenses réelles, sans réaliser de profit. Le locataire a le droit de consulter les pièces justificatives pour vérifier le calcul de ces frais. Dans un immeuble à plusieurs locataires, la répartition se fait soit par décompte individuel (compteurs séparés), soit selon une clé de répartition objective (proportionnellement au volume ou à la surface).
b. Obligation de verser des sûretés (257e CO)
Pour se prémunir des risques liés au paiement en retard, aux dégradations ou à l’occupation illicite après le bail, le locataire doit constituer des sûretés si le contrat le prévoit.
- Montant maximal : Pour les baux d’habitation, les sûretés ne peuvent dépasser trois mois de loyer (article 257e al. 2 CO et 2 CCR).
- Modalités :
- Les sûretés doivent être versées avant la remise des clés.
- Elles sont déposées par le bailleur auprès d’une banque sur un compte au nom du locataire (article 257e al. 1 CO).
- La restitution des sûretés se fait soit avec l’accord des deux parties (article 257e al. 3 CO et 2 al. 6 CCR), soit unilatéralement selon des conditions prévues (exécution d’un jugement ou d’un commandement de payer non contesté).
- Le locataire peut demander la libération des sûretés si, dans l’année suivant la fin du bail, le bailleur n’a fait valoir aucune prétention.
3. Les Obligations Résultant de l’Usage de la Chose
a. Obligation d’entretien
Pendant le bail, le locataire est tenu de réparer les menus défauts relevant de son obligation d’entretien. Il s’agit de travaux simples, exécutables sans investissement important (environ CHF 150), tels que le nettoyage ou de petites réparations indispensables à l’entretien du bien. À l’inverse, en début de bail, même ces menus défauts sont à la charge du bailleur.
b. Obligation de diligence et d’égard envers les voisins
Selon l’article 257f CO, le locataire doit prendre soin du bien qu’il utilise afin de préserver sa substance malgré l’usure normale. Cette obligation vise également à maintenir la bonne réputation de l’immeuble.
- Le locataire doit faire preuve de diligence non seulement à l’égard du bien, mais aussi envers les autres locataires, même en l’absence de relation contractuelle directe.
- En cas de violation répétée de cette obligation, le bailleur peut résilier le contrat de manière anticipée, sous réserve de remplir les conditions cumulatives suivantes :
- Envoi d’une protestation écrite demandant la cessation des violations.
- Persistance de la violation malgré la protestation.
- Insupportabilité objective de la poursuite du bail pour le bailleur ou les voisins.
Pour les baux d’habitation et commerciaux, le congé est donné avec un délai de 30 jours, sauf en cas de préjudice grave intentionnel de la part du locataire.
4. Les Obligations en Fin de Bail
À l’issue du contrat, le locataire doit respecter plusieurs obligations :
a. Obligation de tolérer les visites
Selon l’article 257h al. 2 CO (cf. 5 CCR), le locataire doit tolérer les visites nécessaires à la relocation du bien une fois le bail résilié (par terme ou résiliation). Le bailleur doit informer le locataire en temps utile et tenir compte de ses intérêts (vacances, week-end, etc.).
b. Obligation de restitution de la chose louée
L’article 267 al. 1 CO (cf. 10 CCR) impose au locataire de restituer le bien dans l’état résultant d’un usage conforme au contrat. Le locataire n’est responsable des réparations qu’en cas de dégradation dépassant l’usure normale. Lors de la restitution, le bailleur procède à un état des lieux de sortie (article 267a CO et 10 al. 3 CCR) et informe immédiatement le locataire des défauts dont il est responsable.
c. Obligation de réparer le dommage
Si le bien n’est pas restitué dans un état conforme à l’usage prévu, le locataire engage sa responsabilité contractuelle (articles 97 et 267 CO) et doit indemniser le bailleur pour les frais de réparation. En cas de non-restitution à l’échéance du bail, le bailleur a droit à une indemnité pour occupation illicite des locaux, généralement équivalente au montant du loyer. Le locataire ne supporte la responsabilité que pour les défauts excédant l’usure normale.
Conclusion
Les obligations du locataire sont conçues pour assurer une utilisation respectueuse et un entretien correct du bien loué, tout en garantissant la sécurité financière du bailleur. Du paiement rigoureux du loyer et des frais accessoires à l’obligation de verser des sûretés, en passant par le soin apporté au bien et la restitution en bon état, chaque aspect du contrat de bail vise à établir un équilibre entre les droits et les devoirs de chacun. Cette analyse détaillée met en lumière la complexité et la précision des obligations imposées au locataire, offrant ainsi matière à réflexion sur la protection des intérêts en présence dans le cadre des relations locatives.